• CdP #5 : J'aime pas les romances

    Ici, on aime les titres pute-à-clic.

    Pour commencer cette petite mise au point, je propose une définition personnelle de ces romances que je n'aime pas. Car il ne s'agit pas ici de la simple présence du sentiment amoureux. Ça, ça ne m'a jamais gênée.  Tout personnage a droit au bonheur, que ce soit célibataire ou accompagné. En fait, je n'aime juste pas les histoires axées sur le schéma classique de la romance bas de gamme. C'est à dire : bourrée de clichés, hétérocentrée/normée, prévisible et fantasmée.

    D'accord, on lit pour s'évader, mais faut pas non plus nous prendre pour des pigeons et la plupart des livres de new-romances kinky-bidule... C'est à peine s'ils ne nous balancent pas du vieux pain, assis sur le banc d'un parc public. Et le pire, c'est que ça marche. Ça vend, les amis. ÇA VEND !

    Voilà donc ma petite pensée, où je ne citerai AUCUN titre. A vous de trouver vos propres exemples, je suis sûre que vous avez déjà lu ça quelque part...

     

         1. Les clichés

    Est-il vraiment nécessaire que je rappelle que le cliché est un patron vu et revu mais qu'il n'est mauvais et nocif pour une œuvre que lorsqu'il est utilisé de façon inconsciente, inconsidérée et répétitive ? Bon, c'est fait de toute façon. Auteurs, autrices, ne craignez rien si vous en avez quelques uns, c'est normal et même plutôt sain. Par contre, évitez de toujours ressortir la même soupe : on n'est pas encore en maison de retraite.

    (PS : Je n'ai pas tout mis, ce serait trop long, c'est juste ce qui me répugne/énerve/soule/fait reposer le livre sur l'étagère pour l'éternité et même plus.)

    • Le coup de foudre

    "Mein Gott, le jour où j'ai vu son visage, je suis tombé(e)  i n  l o v e !"

    Bon, généralement, c'est pas écrit texto mais vous avez l'idée. Je mets dans le même sac les "partenaires prédestinés" (âmes-soeurs et compagnie) dans les histoires de loups-garous ou autre créature thérianthropique. Y'a rien de plus paresseux que ça pour écrire une romance sans avoir à expliquer ce que les deux personnages se trouvent mutuellement et les faire finir ensemble quoi qu'il arrive. Sérieux, ils peuvent pas juste apprendre à sa connaître avant qu'il y ait tout le manège de "cette personne est à moah et personne ne doit respirer le même air qu'elle sous peine que je le défonce à la petite cuillère" ? Parce que personnellement, j'appelle ça...

    • Les relations toxiques

    Eh oui. Une personne n'appartient qu'à elle-même. Si votre partenaire clame sur tous les toits que vous lui appartenez et fait preuve d'une jalousie maladive à l'égard des autres qui vous approchent, ce n'est pas bon signe~ Même dans une situation de relation BDSM, le soumis garde sa volonté et sa liberté. Il s'agit d'un choix. A partir du moment où le partenaire cherche à enfermer la personne dans cette relation, ça part en séquestration, les amis. Et si la personne concernée se laisse faire avec le sourire aux lèvres, on part pour un troisième tour de manège ! (essayez de ne pas vomir, svp)

    J'aime pas les romances

    • La soumission et la culture du viol

    On ne va pas se mentir, c'est un schéma classique de créer un couple sur une base forte/faible avec un personnage qui mène la danse (généralement bien charpenté ou plus fort physiquement) et l'autre (plus fin/petit/timide/mal assuré) qui "résiste" jusqu'à se laisser faire. Allant parfois jusqu'au viol~

    Oupsi.

    C'était pas prévu... L'auteur ne voulait pas écrire un viol, mais c'est ce qu'il finit par se passer. Parce que si "consentement" il y a mais qu'il est obtenu par forcing (c'est vous que je regarde, les yaois)... CE N'EST PAS DU CONSENTEMENT ! Faut le dire en quelle langue que le consentement ne doit pas être influencé ? Même juste un "Allez, s'il te plaîîît... Ça fait longtemps", un "Fais un effort" ou un "J'en ai vraiment, vraiment envie" (+ bonus Puppy Eyes) c'est du FORCING.

    Une relation saine ne peut pas partir sur ces bases, je suis désolée.

    • Le partenaire infirmier

    De même, c'est quelque chose qui arrive dans la vraie vie et qui n'est pas sain du tout. C'est quand un des deux partenaires a un problème/handicap et que l'autre partenaire se prend pour son infirmier/docteur/aide psychologique. Ce n'est pas un modèle à montrer et à banaliser. Il faut laisser les pros faire leur travail. Bien sûr, le soutien psychologique et l'aide au quotidien, c'est un impératif. Mais pas plus. Un amoureux n'est pas un soignant, il n'est pas là pour "réparer" son partenaire !

    Allez, on repart sur quelque chose de beaucoup plus léger mais qui m'insupporte au plus haut point~

    • Les malentendus

    "Iel s'entend tellement bien avec cette personne, je suis sûr qu'iel me trompe, je vais le/la quitter" *snif snif pseudo-dépression* *deux heures plus tard* "Quel malentendu ! J'aurais dû lui poser la question directement avant de m'énerver..."

    Mais fuck. Vous trouvez vraiment cette situation intéressante ? 'Fin, tous les goûts sont dans la nature, hein... Mais quitte à les faire se disputer, faîtes-le pour de vraies raisons ! C'est pas ça qui manque ! Y'a qu'à voir le nombre de couples qui divorcent dans la vraie vie. Faut pas être Einstein pour trouver des idées.

    • La première fois

    "Je n'ai jamais vécu ça avant toi"

    Urk. Pourquoi la règle générale veut qu'il n'y ait jamais eu de relation intense (même sans sexe, c'est accessoire) avant ? Je sais pas, moi, t'es jamais sorti(e) de chez toi et c'est le premier être humain que tu croises ? Le grand amour, c'est très mignon, mais c'est pas réaliste pour un sou et ça me sort complètement d'une romance. Que ça se révèle - après des chapitres et des chapitres de rapprochement - par être la relation la plus fusionnelle, oui. Après seulement une journée et trois dialogue (+ coup de foudre, pour faire bonne figure), NON, NEIN, NO !

    J'espère que vous n'en avez pas encore assez ! Parce que ce délicieux biscuit rassis nous mène de ce pas au nœud du problème :

     

         2. Les relations fantasmées

    Je sais que 90% des lecteurs en lisent juste pour s'évader et que plus c'est éloigné de la réalité, mieux c'est. Mais ça véhicule aussi des clichés et des comportements complètement inconséquents chez le jeune public qui tombe sur ce genre de choses. Notamment au niveau... *roulements de tambour* des relations sexuelles. On le voit très, très bien sur Wattpad où de jeunes écrivains écrivent des scènes de sexe irréalistes et dangereuses.

    Combien de romances contemporaines (si c'est historique, fantasy ou autres, ça peut et ça doit se justifier) font état de l'utilisation d'un préservatif ? D'une digue dentaire ? D'un traitement post-exposition ? De prises de sang avant d'arrêter les protections ? Je vous laisse compter, ça ne devrait pas vous prendre trop de temps vu le nombre. Ah ça, y'en a des coups de kékette à nu sans capote ni lubrifiant.

    Parce que non, le lubrifiant ne sert pas que pour l'anal. Ça sert aussi en vaginal, pour ceux qui ne sont pas au courant. En l'absence de ce petit truc qui semble complètement accessoire dans les livres, il peut y avoir déchirement, fissure ou autre joyeuseté. Et les capotes, c'est autant pour les relations hétéro que gays et lesbiennes (sous d'autres formes, évidemment). La transmission d'IST par relation saphique a un taux terrifiant ! Justement parce qu'il n'est pas fait état de protection dans les romans qui en traitent en plus de campagnes de prévention complètement hétérocentrées.

    Alors il y a des auteurs qui vous diront : "Ouais mais ça casse le mood de rajouter ce genre de trucs, c'est pas sexy~". Parce qu'une maladie vénérienne, c'est sexy ? J'suis pas sûre qu'on pécho beaucoup avec une syphilis, mais je peux me tromper.

    Pour plus d'infos : https://weneedmoresafesexbooks.wordpress.com/

    Ce qui ne sert pas non plus la cause, surtout dans les homoromances bizarrement, c'est le fantasme qui les entoure. Qui ne sait pas que la catégorie "Lesbian" de YouPorn est l'une des plus visitées en France par les hommes ? Et qui ne sait pas que la France est également l'un des pays dont la population féminine est la plus consommatrice de yaois et de romans MM ?

    Ce genre d'oeuvres est bien plus tournée vers la satisfaction d'un fantasme que vers une représentation juste de la population mise en scène. Combien d'hommes gays ont lu un MM et ne s'y sont pas du tout retrouvé ? (la prostate, c'est pas un bouton de décollage automatique au cas où vous ne le sauriez pas...) Combien de lesbiennes ont essayé de coucher comme dans un porno et ont découvert que c'était complètement con et que ça ne procurait aucun plaisir ?

    Je ne jette pas la pierre aux lecteurs, ils ne peuvent consommer que ce qu'on leur propose. Mais il est temps pour les auteurs et les maisons d'édition de chercher des moyens plus respectueux des minorités concernées pour traiter leurs histoires amoureuses sans virer dans un militantisme si exacerbé qu'il en engloutit l'intrigue.

    Bref. Ce sont des personnes, pas des objets de désir.

     

         3. Une solution ?

    Je ne suis pas prophète en mon domaine, comme tout un chacun. C'est un fait. Mais si chacun de nous apporte ses solutions, on va arriver à quelque chose. J'ai donc quelques petits tips que j'ai récoltés au cours de mon voyage à travers l'internet. Si vous en avez, n'hésitez pas à les commenter.

    • L'avertissement

    Si votre récit comporte des scènes de sexe sans protection et que cela n'a AUCUNE CONSEQUENCE et est montré comme quelque chose de normal et sans risque, mettez un petit mot au début des livres tel que : "Il s'agit d'un récit de fiction où capotes et autres n'existent pas/n'ont pas encore été inventées. Ne faîtes pas comme eux. Protégez-vous quand vous faîtes des galipettes : c'est important !"

    • L'inclusion spontanée

    Pas la peine de faire un cours de sexologie à chaque fois. Juste glisser un "l'emballage du préservatif tomba au sol" permet de marquer son utilisation. Soyez inventifs, on peut inclure la sécurité sans pour autant ralentir le rythme d'une scène.

    • La dénonciation

    Rien ne vous interdit d'écrire de la Dark Romance. C'est un genre littéraire comme un autre, et très prisé en plus de ça. Maiiis... Il ne faut pas se contenter de romantiser ce genre de schémas, il faut dénoncer les travers malsains lorsqu'il y en a ou, à défaut, laisser un petit mot en début de roman. Certains diront que le lecteur sait parfaitement faire la différence entre sain et malsain, mais un lecteur averti en vaut deux. C'est votre responsabilité en tant qu'auteur.

    • La réalité pour support

    Tout le monde ne fait pas de pénétrations. Tout le monde n'aime pas le BDSM. Tout le monde n'est pas physiquement capable de faire les centaines de positions du kamasutra. Tout le monde ne couche d'ailleurs pas avec son partenaire. Voire ses partenaires.

    La diversité permet des histoires inédites et pourtant réalistes. Pourquoi toujours vouloir aller dans les extrêmes et le malsain pour se démarquer ? Pourquoi toujours ressortir la même soupe et les mêmes scènes de sexe barbantes ?

    Utilisez votre tête, il y a encore beaucoup de sujets qui n'ont pas été traités.

    • Vérification par un tiers concerné

    Lorsqu'il est question d'une minorité sexuelle, mieux vaut faire vérifier certains points. Bien sûr, vérification ne veut pas dire censure. Il est seulement question de ne pas laisser passer quelque chose d'aussi gros qu'une anale sans lubrifiant. De même pour les relations fétichistes comme le BDSM, il y a certaines règles à respecter pour que cela ne devienne pas du viol.

    • Être conscient que ce que l'on lit est une chimère

    La plupart des problèmes viennent de l'apport du fictif dans le réel. Certaines jeunes filles (oui, je cible parce que c'est un problème presque exclusif) fétichisent de véritables personnes homosexuelles et leur posent des questions très embarrassantes sans aucune pression, voire à l'inverse refusent de les reconnaître comme gays parce qu'ils ne correspondent pas au cliché littéraire.

    De même, beaucoup de jeunes lecteurs s'imaginent l'amour comme quelque chose de merveilleux et sans problème, que le premier partenaire sera le bon, comme dans un conte de fée. Puis ils réalisent que la réalité est bien moins mignonne, ou ils se laissent embrigader dans des relations toxiques en pensant que ce schéma est tout à fait normal au sein d'un couple.

    Je ne dis pas que toutes les romances doivent parler de couples qui se déchirent, qui se quittent, qui mettent cinquante ans à se former. Non. Mais des deux extrêmes, il faut arriver à un équilibre intéressant pour ce que l'on cherche à faire et une dénonciation de certains comportements au lieu de simplement les romantiser.

    Voilà voilà, j'ai terminé mon laïus et je sais que certains d'entre vous ne seront pas d'accord. Mais si j'ai pu vous faire réfléchir ne serait-ce qu'un instant, je vous remercie du crédit que vous portez à mes propos !

    « ChrysanthèmeJoker (2019) »
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  • Commentaires

    1
    Samedi 21 Décembre 2019 à 07:02

    L'enchaînement " coup de foudre" "relations toxiques" "soumission et culture du viol" m'a achevée x_x honnêtement je m'attendais à ce que tu commences par citer plusieurs clichés bien connus et puis en fait non, on plonge tout de suite dans le côté dark de tout ça, ça m'a (positivement) surprise :').

    Sinon je suis pas mal d'accord avec tout ce que tu expliques. Le seul point auquel j'apporterais une nuance ce serait celui sur le réalisme. C'est vrai que la romance est un genre assez codé mais le style d'écriture joue aussi beaucoup selon moi. Si le texte est écrit de manière à être plutôt réaliste, "tranche de vie", je suis d'accord pour dire qu'il est de la  responsabilité de l'auteur de faire en sorte que la romance et les scènes de sexe soient réalistes justement (surtout si on parle de romans wattpad lus par une audience assez jeune).

    Après faut pas oublier qu'il y a d'autres styles d'écriture, plus oniriques, qui n'essaient pas de décrire quoique ce soit de réel, c'est pas une question de glamour ou pas glamour mais si je lis un poème, un texte surréaliste ou un roman qui déforme volontairement les codes du réel, j'avoue que je ne m'attends pas particulièrement à être ramenée à la réalité par une digue dentaire furtive.

    Après c'est pas pour ça que le monde de l'écriture en général ne pourrait pas bénéficier d'un peu de diversité romantique et sexuelle avec une petite touche d'éducation sexuelle par dessus, je suis plutôt pour voir de plus en plus de relations diverses et de moins en moins de Julien et Julie qui se croisent une fois dans le métro et en déduisent que leur destin est de fonder une famille, d'avoir deux gosses et d'adopter un chien ensemble.

    Ah puis pour le yaoi... je trouve ça tragique qu'on soit pas capables d'écrire une relation homosexuelle sans que ce soit bourré de relations toxiques et de rapports non désirés, tout ça recouvert de paillettes et d'amûûr merveilleux... je veux dire y en a tellement c'est désespérant ! Dés que j'en trouve un qui s'en sort bien du côté consentement et relations saines (ou bien où les comportements malsains sont au moins désapprouvés), j'ai l'impression d'avoir mis la main sur le Graal -_- alors qu'en Irlande, ils en ont déjà deux ou trois !

    Enfin pour moi la dénonciation c'est le plus important, rien n'empêche d'écrire des personnages tordus, des histoires "d'amour" en zigzag et des risques de propagation d'IST, tant que toutes ces choses sont clairement présentées comme mauvaises et négative (tu sais que tu fatigues quand tu écris ça "énéagative"). Je pense que ce qui fait le plus de dégât ce ne sont pas l'existence de ce genre de clichés dans les œuvres littéraires mais surtout le fait qu'ils soient montrés comme étant la norme.

    Très bon article en tous cas ! Bon mélange d'humour et d'arguments sérieux, tu m'as fait rire et hocher la tête en fronçant les sourcils, j'appelle ça une réussite u_u

     

      • Dimanche 22 Décembre 2019 à 12:35

        Hi. Tout d'abord, merci pour ce long commentaire ^^ (et désolée de ne répondre que maintenant ><). Je suis contente que l'article t'ait plu !

        Je parlais effectivement des romances dans un genre plutôt "classique" type After, Twilight ou encore 50 nuances pour te donner les gros titres. C'est vrai que je n'ai donc pas traité des romances plus poétiques, mais elles n'ont pas tendance à toucher un public sensible et ne m'ont jamais laissé d'arrière-goût amer XD

        De bons yaois qui ne jouent pas avec la limite du consentement, il y en a de plus en plus, même si ce n'est pas encore une majorité. On en trouve même en libre accès sur les sites de certains petits créateurs. La relation yaoi saine se démocratise, sortez les confettis !

        Merci pour les compliments o/

      • Dimanche 22 Décembre 2019 à 21:15

         Avec plaisir ^^ (j'écris toujours trois fois trop, j'espère que je ne t'ai pas endormie non plus ^^')

         C'est vrai que je me suis doutée que tu visais plutôt ce type de romances en lisant l'article, c'est juste que le sujet de la responsabilité de l'auteur me pose beaucoup de questions dans la littérature en général, où trouver la limite et à partir de quand risque-t-on de tomber dans la censure, toussa toussa... Je ne sais pas si tu as lu Hygiène d'un assassin d'Amélie Nothomb ? Le livre ne parle pas que de ça mais la partie où le sujet a été abordé m'a beaucoup intriguée °^°

         C'est vrai qu'on en trouve ! Mais il y en a aussi beaucoup qui font cheval de Troie et qui glisse des petits passages toxiques ou de non consentement en scred et ça me dérange pas mal aussi ^^' Mais bon je suis trop négative, c'est vrai qu'il y en a de plus en plus qui font ça bien *met son chapeau en papier et souffle dans un mirliton*

        Merci à toi pour ton article ! ^^

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