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Kirikou et la sorcière
Bon, ce serait totalement con que je fasse une critique de ce film étant donné que je le mets sur un piédestal sans aucune objectivité. Du coup, on va plutôt s'intéresser à son contenu et l'analyse que l'on peut en tirer. (Attention aux spoils sauvages, ils sont relativement agressifs...) ((Attention bis, ça risque d'être chiant pour vous si vous n'êtes pas adeptes de l'analyse artistique))
(Je vais donner de nombreux éléments en pagaille, j'ai toujours eu du mal avec les dissertations en trois parties trois sous-parties, j'espère que ce sera quand même un minimum instructif)
Je ne vous ferai pas l'affront de mettre un résumé du film alors rentrons directement dans le vif du sujet.
1/ Le back-ground de Karaba
Je suis sûre que vous n'avez absolument aucun souvenir de ce dont je vais vous parler. Nous allons donc entamer la longue série de spoils qui va joncher cet article. Lorsque Kirikou demande à son grand-père (le sage dans la montagne) pourquoi la sorcière est aussi méchante, il lui raconte une histoire. Un groupe d'homme l'aurait immobilisée pour lui enfoncer une épine dans le dos.
Me dîtes pas que vous avez pas vu la métaphore.
...
Vraiment.
Enfin, vaut mieux entendre ça que d'être sourde. Bref, on parle bien ici de la notion de viol expliquée aux enfants. Yeay... Le grand sage enchaîne avec un "si quelqu'un la lui enlevait, elle le tuerait immédiatement", à cause de la douleur que cela lui procurerait. C'est une image des relations de l'après, lorsque le traumatisme est encore profond et que la personne rejette toute relation. Jusque-là, vous me suivez ?
On parle donc d'une femme violée qui hait les hommes, méprise les femmes et essaie de tuer des enfants. Ce qui serait beaucoup moins bien passé dans une œuvre moins subtile. C'est la douleur de la trahison qui a dévoré son âme et l'a rendue aussi agressive. Son mépris des femmes vient de l'attachement que celles-ci montrent pour leurs hommes jamais revenus des affrontements.
Karaba est donc dans un déni de l'amour et de ses valeurs, une réaction très humaine qui la rend sorcière. C'est un personnage avec une véritable psychologie ! (j'aime, que dis-je, j'adore Karaba !)
2/ La libération
Pour continuer sur la lancée, Kirikou doit "se battre" contre Karaba pour la libérer. Mais en réalité, il se bat contre la sorcière, une entité matérialisée par les sentiments négatifs de la femme blessée derrière le monstre.
Il s'agit donc là d'un homme qui tente de faire reprendre foi en l'amour la femme qu'il aime. Il retire l'épine à la force de ses dents car ses seules mains ne suffisent pas, il éradique la source du mal avec les plus gros moyens qu'il a à disposition.
D'ailleurs, l'arrachage de l'épine va jusqu'à changer le paysage autour d'elle et donc la façon qu'elle a de voir le monde.
3/ Les villageois
Comme dans tout conte philosophique, les personnages sont très stéréotypés dans le but de donner des leçons simples, comme les conséquences de l'avidité si l'on prend le cas de la "femme forte" (dixit le générique). On peut cependant décomposer ces rôles en deux catégories :
- Les enfants, qui ne donnent aucun crédit quelque soit l'aide que fournit Kirikou quand bien même il s'agit d'un enfant comme eux.
- Les adultes qui ne donnent aucun crédit à Kirikou parce que c'est un enfant.
Quoi qu'il fasse, Kirikou le fait donc seul si ce n'est avec l'aide de sa mère. Il y a donc un message assez fort qui pourrait se résumer dans un "Aide-toi et le ciel t'aidera", ce n'est pas en comptant sur les autres que les choses avancent.
Le manque de reconnaissance est aussi un thème central. Kirikou a beau venir de nombreuses fois en aide au village, sa condition ne change pas d'un poil. Après, je ne sais pas si c'est à cause du format, c'est à dire un ensemble de petites histoires inspirées de divers contes d'Afrique de l'Ouest. En effet, cela expliquerait la séparation des péripéties malgré le lien que l'on s'efforce à créer comme la présence de la chanson sur Kirikou qui s'étoffe de plus en plus jusqu'à atteindre sa longueur maximale après la mort du buveur d'eau.
(Je voulais vous la mettre, mais impossible de la trouver. Dans un sens, ça prouve que le film est bien protégé donc tant mieux... Mais merde, quoi.)
4/ L'obscurantisme religieux
Oui oui oui... On parle bien de ce genre de choses dans Kirikou. Pour ceux qui ne savent pas, ça consiste en déformer la réalité par des propos ou écrits religieux pour empêcher l'instruction du peuple (grossièrement, hein). C'était la situation de la France pendant le Moyen-Âge où tout se rapportait à Dieu : les récoltes sont mauvaises ? Dieu est en colère, va prier (on enculait les sciences à l'époque, enfin, le peu de sciences qu'il y avait).
Bref. Karaba, en plus de ce que l'on a dit plus haut, représente aussi un organisme religieux. Elle garde les villageois dans la terreur en asséchant la source par exemple. Trop occupés à la craindre, les villageois ont donc le nez dans le guidon et ne pensent pas à remettre en cause ce qu'ils "savent".
Et... Karaba empêche aussi les villageois d'aller dans la montagne, là où se trouve le sage, celui qui sait. On a donc au sens littéral, un blocage des connaissances derrière la terreur religieuse parce que celles-ci mettraient en péril sa domination. Parce que Karaba n'a pas asséché la source, le buveur s'y est introduit tout seul. Karaba ne mange pas les hommes, elle les transforme en fétiches. Karaba n'est pas sans faille et la connaissance la détruirait.
Voilà voilà ! J'espère que je ne vous ai pas ennuyés et que votre enfance va bien, parce qu'une fois que l'on a les éléments en main, ce film prend bien plus de volume qu'une simple fable pour enfants. J'espère que vous le reverrez avec un œil neuf et intéressé, ouvert aux messages qu'il véhicule.
Tschuss !
Tags : film, dessin animé, conte, analyse, 2018
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Commentaires
C'est fou ça ! Je n'ai jamais pu le regarder jusqu'au bout ! Non pas faute de temps, mais simplement que je n'ai jamais accroché ! Pourtant on ne m'en dit que du bien ! Je ne suis peut-être qu'un sans cœur ! Dépourvu de toute émotion !
On a tous des goûts différents, et heureusement ^^ (Peut-être qu'en essayant une fois de plus, ça marchera XD)
Trois ou quatre fois... c'est bien déjà...
Je ne verrai jamais kirikou
Faut peut-être pas tout voir d'un coup, reprendre là où t'as arrêté. D'ailleurs, tu t'es arrêté où ?
Au début ^^
Ah.